La diagonale des fous : récit d’un survivant

Publié le 16.11.2017 par Bruno Maurel - Institut des Biomolécules Max Mousseron (IBMM)

Avec ses 167 km et 9553 mètres de dénivelé positif et négatif, le Grand raid dont le parcours traverse l’île de La Réunion est l’un des trails les plus difficiles du monde : 3 jours sans dormir, des dénivelés qui font peur, une exigence physique inouïe. Bruno Maurel, agent du CNRS, vainqueur du Trail du CAES InterClas 2017 est pourtant parti relever le défi à l’autre bout du monde. Parole au dossard 856, revenu de l’enfer… 

Je n’avais jamais imaginé qu’un jour je me lancerais dans cette incroyable aventure. Je m’y suis préparé et je l’ai fait ! 10 mois d’entrainement, 7000 km de vélo et de course à pied, 11 200 mètres de dénivelé positif cumulés et quelques moments conviviaux : stage de vélo à Aix-les-bains, rencontres InterClas CAES à Aussois…

2600 coureurs s’élancent dans la nuit

Jeudi 19 octobre – 22h00

Il est 22h00 à St Pierre dans le sas de départ de la course. Top ! 2600 coureurs qualifiés pour ce trail s’élancent. Nous, nous sommes 4 copains. La foule est en surchauffe (peut-être le rhum ??).  Nous sommes « coincés » pendant 7 km par le public qui clame ses ovations de chaque côté de la route. Nous ne nous libérons de cette étreinte qu’au kilomètre 10. Nous entrons dans les champs de cannes à sucre, puis le jour se lève sur le piton Textor et sa mer de nuages en contre-bas. Fin de la première montée : il est 6 h du matin.

Vendredi 20 octobre 2017

Arrive une longue traversée et montée vers le coteau Kerveguen à 2300 mètres d’altitude, puis une grosse descente sur la ville de Cilaos où nous attendent nos compagnes pour un bon arrêt ravitaillement (65 km  – 3300 m de dénivelé). Après une douche et un repas nous repartons à 15 h 30 pour le « très dur de la course » : 48 km et 4000 m de dénivelé montant avec le très difficile col du Taïbit et le cirque de Mafate qui ne va pas nous laisser une seconde de répit (une lessiveuse). Nous arrivons sur le village de Marla où nous allons allumer les frontales pour une deuxième nuit, et quelle nuit ! 

Samedi 21 octobre 2017

Marche après marche, ravine après ravine, nous sortons de la nuit à Roche plate, village situé au pied du col du Maïdo. Petit arrêt ravitaillement et nous repartons pour sortir de ce cirque magnifique ; c’est d’ailleurs dans cette montée que nous allons nous apercevoir du chemin parcouru et de la majesté du Site. En haut du col nous attend notre fan club qui a passé une grande partie de la nuit à 2030 mètres d’altitude pour le lever du soleil et aussi pour nous encourager. Pause de 3 mn puis nous attaquons les 55 derniers km avec encore 2200 de dénivelé montant. Après 13 km de descente sur 1900m de dénivelé nous voilà à Sans-souci (pas pour tout le monde !!!). Un de mes compagnons de route à des ampoules (un vrai sapin de Noël !!!). Un arrêt repas, un massage et c’est reparti. Tout va bien jusqu’au lieu-dit « le chemin des anglais »  – encore eux ??? –  il est 18h00 sur le chemin classé par l’Unesco : 9 km de pavés de roche volcanique sur un champ de 7 mètres de large non jointé, une planimétrie à revoir et une chaleur à vous croire une pâte dans une casserole d’eau bouillante. Ouf ouf, sauvés ! La troisième nuit débute mais je n’ai pas fermé l’œil une seconde depuis jeudi et je vais le payer pendant une grosse heure en pleine et dernière ascension juste avant la descente sur le stade de la Redoute à St Denis. Je vais lutter et persuader ma tête de ne pas dormir ; enfin nous arrivons en haut « Colorado » plus que 4 km qui sont interminables avant qu’apparaisse l’entrée du stade.

Descente abrupte
Slalom entre les pierres
Enfin un chemin carrossable

 

Bruno franchit la ligne d’arrivée

Dimanche 22 octobre 2017

Il est 0h45 et notre fan club est là. Nous sommes partis à 4 compagnons et nous arrivons à trois (le 4e a abandonné en haut du Maïdo).

Notre temps : 50 h 43 mn 29 s !

Aujourd’hui, me reviennent des images plein la tête et une médaille. Mais aussi, un T-shirt sur lequel est écrit, comme le veut la coutume : « J’ai survécu ».

 

 

 

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